DJ S.Y.D : « Twenty-five » - Bruits de Fond 03 (2001)

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Le dj mix a toujours occupé une place privilégiée au sein de l’équipe de « L’Ultime Atome », et ce dès son origine en 1995. Né sur des fondations techno, ce fanzine n’a eu de cesse de promouvoir l’art des mélanges sonores, avec une prédilection pour ceux conduisant à la danse. Mais pas seulement. Ou plus exactement, comme il existe mille et une manière d’exprimer le ressenti de la musique avec son corps, le parcours proposé par un dj peut faire naître des émotions et vibrations très diverses. Il n’existe pas un unique appel à la danse, et celle-ci peut revêtir la forme la plus hystérique comme la plus retenue, la plus démembrée comme la plus cadencée.

 

jaquette_twenty_five.jpg Nous l’avons souvent répété, sorte de garde-fou face au diktat du dancefloor (qu’il soit imposé de manière mercantile, dans les clubs par exemple, ou qu’il constitue la norme dans les rassemblements soit-disant libertaires) : le groove commence dans un fauteuil (ou tout autre espace ou l’on se la coule douce). Pour nous, cela signifie le droit de danser (ou pas), et de l’autre côté des platines, le droit de faire danser (ou pas). Ainsi, il s’agit d’accorder une importance égale, fondée sur la reconnaissance artistique, tout à la fois au plus efficace agitateur rythmique et au plus modeste des pousseurs de disques, tentant de faire partager, parfois plus avec son cœur qu’avec une technique infaillible, les sons qui illuminent sa vie.

 Il s’agit du coup aussi de savourer pareillement les moments intenses, lorsque sur la piste l’inhibition tombe d’un coup, et les moments de découverte, voire de déstabilisation, lorsqu’on se retrouve confronté à ce qu’on a jamais entendu. Bref, laisser le dj construire ou déconstruire, que le beat s’impose ou qu’il implose, sans a priori. Savoir écouter, tout simplement.

C’est sur ces fondements qu’il faut bien nommer "ouverture d’esprit et tolérance" que la plupart des contributeurs à L’Ultime Atome se sont eux-même essayés au djing (certains étaient d’ailleurs renommés pour cela avant de prendre le stylo et se joindre à nous le temps de quelques chroniques ou billets d’humeur), au plaisir de devenir acteur de leur musique, imaginant de nouveaux possibles, esquissant des formes inédites, avec leur discothèque ("une auberge espagnole aussi capricieuse qu’exigeante", avions-nous un jour écrit pour définir notre environnement sonore) comme matériau de base et les moyens du bord comme outils de création (parfois une simple mixette de seconde zone entre deux antiques tourne-disques).

Des raves du Grand Ouest (l’âge d’or 1993 - 1997) à l’ouverture des structures conventionnées – à la fin du siècle –, des festivals dédiés aux musiques "transversales et décalées" ("ultimes" ou "obliques", comme on les appelait à une époque chez feu Noise Museum) en passant par les squats d’artistes, les bars, les fêtes privées (nouvelles zones d’autonomie temporaire ?), nous avons donc essayé, en évitant les écueils de la compromission, de "faire entendre ces sons jamais entendu". Musiciens non reconnus (les fameux 600 000 home studio amateurs recensés par le Ministère de la Culture), œuvres oubliées, publiées simplement pour les amis, références introuvables dès leur sortie, méprisées par les distributeurs, scandaleusement réservées aux seuls initiés, inexistantes au regard de la SACEM / SDRM, travaux de recherche et curiosités sonores : nos passages derrière les platines ont toujours été l’occasion de célébrer les artistes à la marge du marché et de transformer en kilowatts leurs créations d’alcôve, ces riches heures enregistrées au creux des niches oubliées par l’industrie du disque. Bref, de mettre en application notre leitmotiv : des musiques marginales pour tous ! Ce projet constituant ni plus ni moins que le prolongement immédiat, et forcément plus "retentissant" de notre activité de fanzinat, il nous a semblé évident d’assurer la diffusion de nos mixes, et de ceux des dj’s dont nous nous sentons proches (en terme de valeurs plus que de goûts proprement dits) par les moyens désormais à notre portée : la reproduction d’un côté, la mise en ligne de l’autre.

 L’Ultime Atome s’est ainsi doté en cette année 2001 d’un label, Bruits de Fond. Dans un premier temps sans budget ni structure juridique, mais prêt à faire tourner son cdburner pour que ses références ne soient jamais épuisées. Et plutôt ouvert d'esprit, comme en témoigne le libre téléchargement proposé tout au long de nos pages web, comme sur le site de P2P que nous fréquentons assidûment (reste à deviner lequel, et sous quel pseudo...). De quoi danser sur la table du salon sans risque de se ruiner.

De fait, poussez les meubles pour de vrai afin d’apprécier pleinement l’enregistrement que voici. Car « Twenty five » n’a pas été conçu pour qu’on reste glander dans le canapé, c’est clair. Au programme, donc, les meilleurs spécialistes des beats à fragmentation réunis pour 73 minutes d’un mix ressemblant fort à une collection de tubes. On ne s’étendra pas plus longuement à son sujet, le tracklisting ci-dessous apparaissant comme suffisamment explicite. Un dernier conseil, quand même : échauffez-vous un peu avant de tenter votre première vrille sur la tête. Et méfiez-vous du parquet tout récemment ciré, un moonwalk un peu précipité risquerait de vous être fatal !

 

 

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Tracklisting :

Alec Empire : « New acid » (Mille Plateaux)

IMP Electronics for defence : « Toxic »(Mixer)

2 Be Freak : « Vanille fraiseuse crème chantier » (Nature)

Com. A : « Raider » (Fat Cat)

S. E. L. : « Vincenzo’s grammatical cumshot » (Ambivalence)

Bogdan Raczynski : track C3 - « Samuraï Math Beats » (Rephlex)

Bogdan Raczynski : track D3 - « Boku mo wakaran » (Rephlex)

Doormouse : track A1 - Addict 004

Homas : « Fracture du cerveau » (Peace Off)

Lester Lewitt : « Mushy pea » (Elf Cut)

Hecate & the Jackal : track 1 - « Hecate jacks off the Jackal » (Zhark)

Panacea : « Motion sickness (rock n’roll mix) » (Quarz)

Doormouse : « Toxic jungle » (Addict)

Scud : « Come with it » (Deadly System / Praxis USA)

Noize Creator : « ‘t?ut! di’strak?n »(Suburban Trash Industries)

Kapotte Musiek vs Merzbow : « Continuum »

Esognomig : untitled (Sonig)

Zan Lyons : « Warring factions » (Foundry)

Christoph De Babalon : « Nameless # 2 » (DHR)

Tusken Raiders : « Banthard » (Planet μ)

The Redeemer : « Mindcontrol »(Position Chrome)

John Spencer Blues Explosion : « Not yet - splatter mix byTechno Animal » (Mute)

Doormouse : track A1 - Addict 003

Christoph De Babalon : « Cum on (feel this) » (Fat Cat)

Fennesz : « Tor » (Tanz*Hotel)

V/Vm : « Machine components vol. 4»

Pisstank : « Beat me daddy (eight to the bar) »(Kool Pop)

Alec Empire : « Nobody gets out alive !» (DHR)

Slam : « RZN » (Peace Off)

Downpour : « A beginner’s guide to mass hysteria » (Drop Beat)

 

 

Mastering : HomaS @ Jardin Moderne (Rennes)

Artwork : S.Y.D

 

 

Chronique parue sur le blog Dweller On The Fringe :

Another great mix from the Bruits de Fond series, this time from way back in 2001.  The mixing is decent but it’s the track selection that I really like here.  Like many “breakcore” mixes from back then, there is a little more variation than you’ll usually find these days, just because the style wasn’t written in stone yet and it was more a case of finding tracks that worked together (as opposed to setting out to make a breakcore mix).  Anyway, I can’t stress enough how good the mixes on this label are, and this is probably one of the better ones.

Dweller On The Fridge (2009)